Microsoft impose OneDrive par défaut dans Word : pratique ou intrusion ?

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Microsoft impose OneDrive par défaut dans Word : pratique ou intrusion ?

Imaginez la scène : vous ouvrez Word pour rédiger un document important, et sans que vous n’ayez rien demandé, votre texte s’envole automatiquement vers le cloud de Microsoft. C’est exactement ce qui vient d’arriver depuis octobre 2025. Microsoft a décidé de modifier radicalement le comportement de Word sur Windows : désormais, chaque nouveau document est automatiquement sauvegardé dans OneDrive, avec l’enregistrement automatique activé dès le départ.

Cette annonce, glissée parmi d’autres nouveautés lors d’un événement dédié à OneDrive et Copilot, fait déjà grincer des dents. Entre promesse de simplification et inquiétudes sur la vie privée, ce changement soulève une question essentielle : à qui appartiennent vraiment nos fichiers ?

Le cloud imposé comme nouvelle norme

Jusqu’à présent, Word créait un nouveau document non enregistré sur votre ordinateur et vous proposait de le sauvegarder dans OneDrive si vous le souhaitiez. Désormais, le logiciel fait exactement l’inverse : votre document part directement dans le cloud de Microsoft, et c’est à vous de faire l’effort supplémentaire si vous préférez le garder en local.

Pour Microsoft, la logique est simple : faciliter la sauvegarde automatique, permettre l’accès depuis n’importe quel appareil et encourager le travail collaboratif. En théorie, cela protège vos documents contre les pannes d’ordinateur et les oublis de sauvegarde. Mais en pratique, cela transforme OneDrive en passage obligé pour des millions d’utilisateurs qui n’ont peut-être jamais souhaité utiliser ce service.

La firme de Redmond teste actuellement ce système auprès des utilisateurs Insiders, avant un déploiement plus large prévu dans les prochains mois. Si tout se passe comme prévu, cette fonctionnalité deviendra la norme pour tous les abonnés à Microsoft 365 et Word.

L’intelligence artificielle au cœur du dispositif

Ce changement ne peut se comprendre sans regarder l’autre grande révolution annoncée par Microsoft : la refonte complète de OneDrive, dopée à l’intelligence artificielle. Copilot, l’assistant IA de Microsoft, s’intègre désormais directement dans l’interface, devenant le centre névralgique du service.

Concrètement, Copilot peut résumer un document Word ou un PDF, retranscrire des enregistrements audio, rechercher des informations dans vos dossiers ou encore créer des albums photos automatiques. Pour les photos de famille, un agent appelé Photos Agent peut retrouver des clichés selon un thème précis ou créer des diaporamas. Tout cela nécessite évidemment que vos fichiers soient dans OneDrive.

L’argument de Microsoft est séduisant : pourquoi se compliquer la vie quand l’IA peut tout faire pour vous ? Mais cette intelligence a un prix caché. Pour fonctionner, Copilot doit pouvoir accéder à vos fichiers, les analyser, les comparer. Le cloud devient ainsi une condition technique indispensable. Sans OneDrive, pas de Copilot. Et sans Copilot, vous passez à côté des « innovations » promises par Microsoft.

Une question de contrôle et de confidentialité

Les inquiétudes sont nombreuses et légitimes. D’abord, il y a la question du choix : beaucoup d’utilisateurs évitent délibérément le cloud pour garder leurs documents hors ligne, à l’abri des piratages, de la surveillance d’entreprise ou même des réquisitions gouvernementales. Certains préfèrent utiliser Dropbox, Google Drive ou simplement leur disque dur local.

Ensuite, il y a les risques de sécurité. Un candidat qui télécharge son CV sur une plateforme de recrutement pourrait involontairement exposer des documents confidentiels de son employeur si le fichier provient d’un OneDrive professionnel. Les tokens d’authentification OAuth peuvent persister pendant une heure ou plus, multipliant les risques d’accès non autorisé.

Microsoft assure que les données restent protégées, avec un chiffrement AES 256 bits et des politiques strictes d’accès pour ses ingénieurs. L’entreprise affirme également que les données des utilisateurs ne servent pas à entraîner ses modèles d’IA. Cependant, l’absence de chiffrement de bout en bout signifie que Microsoft peut techniquement accéder à vos fichiers. Et dans certaines juridictions, notamment aux États-Unis, un simple mandat peut suffire pour que les autorités obtiennent vos données.

La résistance s’organise

Sur les forums et réseaux sociaux, la réaction ne s’est pas fait attendre. Beaucoup d’utilisateurs dénoncent une intégration trop agressive entre Windows, Office et OneDrive. Certains parlent d’une « érosion de l’autonomie numérique » et d’un « capitalisme de la donnée » où chaque clic nourrit les algorithmes de Microsoft.

Cette politique pousse certains vers des alternatives open source comme LibreOffice, compatible avec les formats Microsoft mais sans contrainte cloud. D’autres explorent des solutions de synchronisation locale comme Syncthing. Le Danemark, par exemple, a migré massivement vers Linux et LibreOffice, citant les économies et le meilleur contrôle des données comme motivations principales.

Pour les professionnels manipulant des rapports confidentiels, des documents juridiques ou des recherches propriétaires, ce téléchargement automatique pourrait exposer involontairement des informations sensibles. La conformité au RGPD en Europe ajoute une couche de complexité pour les entreprises devant justifier où transitent leurs données.

Vers un cloud incontournable ?

Microsoft n’est pas le seul à pousser ses utilisateurs vers le cloud. Google, Apple et d’autres géants technologiques adoptent des stratégies similaires. La question n’est donc pas de savoir si le cloud va s’imposer, mais comment préserver la liberté de choisir.

Heureusement, ce nouveau comportement de Word peut être désactivé. Les utilisateurs qui souhaitent continuer à sauvegarder leurs fichiers localement pourront le faire, mais ils devront activement modifier les paramètres. C’est précisément ce « par défaut » qui pose problème : en rendant OneDrive obligatoire sauf action contraire, Microsoft inverse la logique du consentement.

Ce virage stratégique reflète l’ambition plus large de Microsoft d’intégrer l’informatique en nuage dans chaque aspect de notre vie numérique. La firme mise sur l’accessibilité, la sécurité et la collaboration pour convaincre. Mais elle prend aussi le risque d’aliéner une partie de sa base d’utilisateurs, celle qui valorise la vie privée et le contrôle de ses données.

Alors, cette évolution est-elle une aubaine ou une menace ? La réponse dépend largement de votre rapport au cloud et à l’intelligence artificielle. Si vous appréciez la simplicité et la synchronisation automatique, ce changement vous séduira probablement. Mais si vous êtes attaché à votre autonomie numérique et à la confidentialité de vos documents, il est temps de vérifier vos paramètres et, peut-être, d’explorer d’autres options.

Et vous, que pensez-vous de ce changement ? Êtes-vous prêt à confier tous vos documents au cloud, ou préférez-vous garder le contrôle ? N’hésitez pas à partager votre avis dans les commentaires.


Sources

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